Réparons l'Eglise
Ils ont intitulé cette démarche : “Réparons l’Eglise”... qui a suscité beaucoup d’intérêt et des milliers de réponses.
Vous trouver ci dessous le compte rendu Débats en Weppes que nous intitulerons : « Comment réformer l’Eglise ? »
Compte rendu de la rencontre du 6 février 2020.
ARRANGEONS L’EGLISE.
Nous étions plus de deux cents pour accueillir Samuel Liévin, directeur de la rédaction du magazine Le Pèlerin. Originaire de la région, il la connaît bien d’autant qu’il a commencé sa carrière à La Voix du Nord avant de rejoindre le groupe Bayard comme journaliste au Pélerin et à La Croix.
Son intervention a porté sur l’enquête que les deux publications ont lancée auprès de leurs lecteurs sur le thème : « Comment faire pour « Réparer l’Eglise » ? Lui-même est croyant, et il s’efforce de se distancier quand il aborde des sujets religieux, en particulier quand il est appelé à s’exprimer sur les résultats de l’enquête dans des milieux laïcs au cours de discussions télévisées, interviews,… Son lectorat est massivement « catho » et s’est donc senti atteint par toutes les révélations d’abus reprochés à des clercs. Plus généralement, il estime que toute la société a fortement ressenti la gravité du débat car, même neutre sur la religion, elle attend une attitude exemplaire de l’Eglise servante des plus fragiles.
Samuel Liévin nous a donc rendu compte ensuite des réactions qu’il a observées dans le lectorat de Bayard. Ainsi après un titre choc « Je ne voulais pas mourir sans avoir parlé » qui contenait les déclarations d’une victime, le courrier des lecteurs a été d’abord négatif, insistant cependant sur les prêtres qui sont fidèles et travaillent. Puis vint une seconde salve de courriers plus positifs : la vérité est nécessaire pour pouvoir rebâtir ! Et les informations se multiplient : Mgr Pican condamné pour ne pas avoir dénoncé, les abus du fondateur des légionnaires du Christ, et les informations venant d’autres pays (USA, Australie,…). Au début, la conférence des évêques de France –CEF- semble rester sur la réserve pensant que chez nous ces dérives ne sont pas développées et marque une défiance vis-à-vis de l’action du Pèlerin. Cependant, depuis quelques années, beaucoup d’éléments sont sortis : intervention de Véronique Margron (pour les congrégations religieuses), sortie d’un film sur l’affaire Preynat, le procès de Mgr Barbarin, et même quelques cardinaux…. Heureusement qu’à Rome, le pape François a un langage clair et exige la coopération des responsables ecclésiastiques avec la justice du pays. Il réclame aussi une transparence totale des évêques. Dans les médias, tout est amplement transmis et commenté instantanément et les réseaux sociaux s’y intéressent beaucoup. Il s’en dégage un sentiment de perte de repères. Quant au courrier des lecteurs du Pèlerin, il exprime d’abord le choc ressenti devant l’inaction des évêques : tous coupables ? Arrive ensuite un temps d’exaspération indiquant un doute sur l’Eglise mais relevant aussi tout ce qui se vit dans les paroisses et aussi un doute vis à vis des médias……On y retrouve enfin l’attente d’un sursaut. Le Pèlerin publie alors, dans une de ses parutions, le témoignage de dix personnalités qui disent continuer à « attendre quelque chose » des chrétiens et de l’Eglise. Différents mouvements se mettent en marche. C’est alors que La Croix et Le Pèlerin décident de lancer leur enquête auprès de leurs lecteurs. Ils recueillent 5000 réponses qui sont résumées dans un livre par Dominique Greiner, rédacteur en chef de La Croix et Assomptionniste. Tous les âges sont représentés parmi les répondants. Même si quelques réponses expriment du dégoût et le sentiment d’avoir été berné, la majorité est positive, exprime la satisfaction d’avoir la Vérité (qui rend libre…), et la volonté de s’y mettre pour reconstruire.
Parmi les réactions, notre intervenant mentionne :
Choc, Tsunami, crise,… Effondrement. La crainte d’un « catho-bashing »….
Importance de la vérité pour pouvoir revenir aux sources et remettre en ordre
L’Eglise en a vu d’autres : le schisme de 1054 et la séparation des orthodoxes, Luther et le protestantisme, et aussi les Borgias,…
L’importance de donner la parole aux victimes et d’accepter de tout entendre
Même si certains se sentent trahis, l’appartenance à l’Eglise en crise n’entame pas la foi dans le Christ et dans l’Evangile.
Pour les jeunes chrétiens, ils ressentent souvent la critique du milieu de vie scolaire qui les voit comme amis des pédophiles…
L’attraction de certains pour le protestantisme vu comme plus ouvert : les femmes mieux reconnues, l’absence de clercs, un fonctionnement plus clair et en face de cela l’Eglise vue comme rétrograde… ;
Des attaques du cléricalisme en particulier du niveau intermédiaire (évêques, en finir avec les Princes de l’Eglise,…), mais aussi un appel à soutenir nos prêtres. Trouver le moyen de développer le lien du prêtre avec la communauté.
A noter que malgré tout (et même ses maladresses…), le pape François surnage dans les commentaires…
Comment les deux périodiques accompagnent-ils ces questionnements ? Ce sera d’abord en rendant compte de tous les faits avec rigueur et en présentant plusieurs dossiers pour approfondir, Mais aussi en donnant la parole à tous les points de vue dans l’Eglise. La parole sera aussi donnée abondamment à Jean Marc SAUVE qui préside la commission, indépendante des Evêques, qui reçoit tous les témoignages de victimes d’abus de clercs. Les rédacteurs de la Croix ont aussi entrepris un tour de France des paroisses. Des responsables ecclésiaux étrangers sont invités à rendre compte des actions menées dans leurs pays respectifs pour renouer à l’Eglise universelle. Enfin le Pèlerin propose des outils s’appuyant sur des témoignages d’actions menées dans les paroisses (à consulter sur le site Pelerin.com). Toutes ces actions portent du fruit, puisque la parole circule et que des formations sont proposées à tous niveaux et en particulier dans l’enseignement catholique. On notera aussi quelques avancées institutionnelles dans la Conférence des Evêques qui accueille lors de ses rencontres annuelles des laïcs et des victimes
Pour terminer, notre hôte nous présente quelques pistes qui sont apparues pour rendre l’Eglise à nouveau audible. En même temps que nous vivons une crise grave, nous devons considérer être à un moment favorable : les abus de jeunes « faibles » apparaissent maintenant dans beaucoup de lieux et l’Eglise sera la première institution qui prendra le problème à bras le corps. Pas de quoi être fier, mais une occasion de refonder le rapport à l’autre, en particulier vulnérable. Comment ? Par exemple :
Transformer la crise en mutation en formant plus sérieusement et mieux les intéressés, futurs prêtres ou enseignants ou moniteurs de sport ou……Mais aussi en améliorant la gouvernance des institutions concernées : l’Eglise, les établissements d’éducation, le mouvement sportif….Enfin en mettant en œuvre une tolérance ZERO.
Apporter une réponse collective en mettant partout la victime au centre car tout doit partir du vécu.
Reconnaitre le prêtre comme un homme normal qui est au service de la communauté, pas un surhomme dont les laïcs attendent tout
Que les laïcs ne rêvent pas de prendre la place des clercs, ni le pouvoir, mais que leur place et leur autonomie soient clairement dites.
Que l’Eglise soit vraiment proche, ayant un langage simple et accessible à tous, qu’elle ne se positionne pas en surplomb, mais que ses communautés soient ouvertes à tous.
Qu’elle s’efforce d’entrer en conversation avec le monde, même s’il a changé et s’est sécularisé, en particulier en coopérant dans tout ce que ce monde a de beau et de juste et en y apportant une ouverture spirituelle : l’Eglise au milieu de Ce Monde !
Compte rendu établi par Gaston Vandecandelaere (10/02/20)
Pour plus d’informations sur ce sujet, trois livres sont disponibles en particulier à La Procure :
« Réparons l’Eglise » par Dominique Greiner, rédacteur en chef de La Croix. Il s’agit ici du compte rendu des 5000 réponses des lecteurs du journol à l’enquête lancée en mars 2019.
« Les Cathos n’ont pas dit leur dernier mot » par Isabelle de Gaulmyn, rédactrice en chef à La Croix qui rend compte de nombreuses rencontres avec des catholiques engagés.
« Un Moment de Vérité » par Véronique Margron, présidente de la Conférence des Religieuses et Religieux de France (CORREF). Une analyse des raisons et des dérives du choc actuel et 12 propositions de réformes.
Le groupe “Débats en Weppes”