La rencontre où le Père Ulrich nous présente son livre « l’Espérance de déçoit pas »
Débat en Weppes a choisi comme fil conducteur des conférences de l’année l’Espérance, car la désespérance semble progresser dans notre société. Tel est aussi le point de départ du Père Ulrich.
Le 20ième siècle est traversé par les barbaries des deux guerres mondiales et particulièrement la seconde. Or en 1945 le désir d’un nouveau développement surgit avec le besoin de reconstruire : ce sont les trente glorieuses sur le plan économique, la création de l’Europe réunissant les anciens ennemis, la décolonisation,…. Puis surviennent les chocs pétroliers dans les années 70, occasion de constater un coup de frein dans la croissance et aussi que tout n’est pas réglé : la faim subsiste dans des zones énormes, la tension Est-Ouest fait craindre la guerre, et d’ailleurs de nombreux conflits locaux existent. Les sciences et techniques amènent des changements « fulgurants » et cette accélération rend difficile la transmission entre générations : sentiment de ne pas maitriser et donc peur…. !
Or nous croyons que la Bonne Nouvelle a quelque chose à dire à notre monde en ce début de 21ième siècle à condition de revenir aux fondamentaux de l’Evangile. C’est Saint Paul (Romains V 5) qui nous dit « L’Espérance ne déçoit pas »
Et nous pouvons le constater dans les 20 siècles d’histoire du christianisme pendant lesquels s’est manifestée une volonté d’action dans le monde où nous sommes et non pour le ciel que nous espérons. L’Espérance est pour nous une boussole pour nous entrainer à rendre possible un avenir meilleur. Ainsi de l’enseignement social de l’Eglise, initié en 1891 par une célèbre encyclique (Rerum Novarum), qui propose dans ses textes successifs une organisation de la société à construire en fidélité à l’Evangile. Par exemple, Paul VI, dès 1971, promulgue un texte dans lequel, il attire l’attention sur les risques liés au mépris de l’écologie et au développement des villes qui induisent des modifications profondes de mentalité.
Notre Espérance nous invite à percevoir dans le présent les possibilités cachées d’un avenir neuf à créer : les « signaux faibles » du changement ! C’est par exemple la réaction d’Augustin qui apprend en 410 que les « Barbares » ont démoli Rome. Or les chrétiens s’y trouvaient bien : plus de persécutions, religion reconnue et en expansion ….. Or augustin dit que l’expansion du christianisme se poursuivra, car Dieu le veut, et il voit donc, dans la venue des Barbares….une nouvelle chance de ce développement hors de l’empire romain, et ainsi fut fait. Jean Claude Guillebaud écrit : « le futur n’est jamais une menace, il est toujours une promesse ».
Deux difficultés particulières de notre époque. D’abord la communication dont les outils n’ont jamais été aussi puissants et diversifiés. Cependant ce qui dirige (presque) tous les média, c’est l’argent. Ils sont donc en recherche de lecteurs et ce qui les (nous) attire c’est le spectaculaire, l’immédiateté, la simplification outrancière,… Comment trouver la bonne distance pour la communication de l’Eglise dont le message suppose une prise de temps, l’acceptation d’un Universel, le respect de la personne dans son individualité et son secret,… Il reste encore du chemin pour nous adapter à ces media et aussi pour les faire évoluer. La seconde difficulté se trouve dans notre environnement socio-économique lui aussi guidé par la recherche de profit immédiat alors que l’enseignement social de l’Eglise est articulé sur quelques principes éloignés des pratiques actuelles :
Prendre le plus faible comme référence, car si lui est respecté, chacun le sera
.La terre est à tous : destination universelle des biens
Principe de subsidiarité qui veut que le lieu de décision soit le plus près possible du lieu d’action
Respect de la propriété privée pour permettre l’initiative à condition qu’elle serve l‘intérêt collectif.
Valeur inaliénable de la personne
Le travail prime sur le capital : le développement n’est pas que financier.
Ainsi, en 1991, en promulguant « Centesimus Annus » pour le 100ième anniversaire de la première encyclique sociale, Jean Paul II a-t-il mis en question le capitalisme libéral 2 ans après la chute du communisme qu’il avait ardemment combattu.
Pour terminer son intervention, le Père Ulrich nous présente, parmi d’autres, quelques « signaux faibles » que l’on peut discerner aujourd’hui :
Le microcrédit inventé par Muhammad Yunus (prix Nobel) au Bengladesh pour rendre le crédit accessible à ceux qui sont exclus du « système » pour qu’ils puissent entreprendre.
Le développement de l’ économie sociale (voir la conférence suivante de Nicolas Cordier)
La gestion démocratique
Le financement mixte public/privé
Les Focolari qui mettent en œuvre l’économie de communion dans le partage des profits
Le fait que l’Union Européenne se définisse comme une « Economie Sociale de Marché », dans laquelle l’initiative et l’utilité sociale se conjuguent, l’économie est régulée, la justice sociale est promue dans une culture de modération.
La route sera encore longue pour que notre société respecte l’Homme, mais cette route existe.
Gaston Vandecandelaere (18/03/2015).
Le livre du Père Ulrich s’intitule : L’Espérance de déçoit pas ; il est édité chez Bayart. A noter que le Père Ulrich a demandé à 4 personnes de donner leur avis sur ce thème à partir de leur expérience de vie.